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Madère

Les picos du centre de Madère

Mercredi 14 juin 2017
Réveillé par les cloches de l'église à sept heures, je me lève pour constater que le soleil brille à nouveau... par son absence. Une fois encore, le ciel est gris, bouché par les nuages.
Le taxi emprunte la même route qu'hier soir, mais en sens inverse. Vers neuf cents mètres d'altitude, nous pénétrons dans les nuages. Trois cents mètres plus haut, dans une forêt de sapins, des rayons de soleil percent et soudain nous émergeons dans le grand bleu.
Nous commençons notre randonnée au parking du Pico do Arieiro à 1818 mètres d'altitude, juste sous la grosse boule blanche du radar militaire. Les lieux sont arpentés par de nombreux touristes, la majorité montés là en car. Il faut dire que c'est sans doute l'endroit le plus facile d'accès pour bénéficier d'une vue panoramique sur la chaîne de montagnes du centre de Madère. Vue panoramique depuis le Pico do Arieiro
Vue panoramique depuis le Pico do Arieiro
Autour de nous, c'est une mer de nuages à perte de vue que déchirent les pointes acérées et les faces abruptes des montagnes. Le sentier PR1, bien marqué, pavé, équipé par endroits de câbles, descend d'abord au milieu des genêts et vipérines. Les grappes de fleurs violettes de ces dernières sont gorgées de nectar sucré qui attire bourdons et lézards.
Bientôt, c'est le belvédère de Ninho da Manta qui nous offre une superbe vue sur la vallée de Fajã de Nogueira. Vue depuis le belvédère Ninho da Manta
Vue depuis le belvédère Ninho da Manta
Un premier tunnel permet de passer sous le Pico do Gato. Deux autres tunnels plus longs (lampe frontale obligatoire !) et quelques autres plus courts nous mènent à la partie la plus difficile du parcours. Des escaliers métalliques, relativement raides, conduisent à un petit col où la vue est toujours aussi spectaculaire sur les pics volcaniques qui nous entourent.
Dans la pente, nous remarquons de nombreux arbres morts aux troncs blanchis. Il s'agit de bruyères arborescentes victime d'un grave incendie en 2010 qui a ravagé une bonne partie du centre de Madère. Vallée entre Pico do Arieiro et Pico Ruivo
Vallée entre Pico do Arieiro et Pico Ruivo
Le sentier court ensuite à flanc de montagne avant de s'élever plus franchement jusqu'au refuge. Celui-ci est fermé, trop vétuste, une rénovation étant prévue mais sans réelle certitude. Nous mangeons là, à l'ombre des seuls arbres vivants croisés depuis notre départ. Il y a plus de monde ici, il faut dire que les lieux sont à la croisée de trois sentiers de randonnée.
Rassasiés, nous franchissons rapidement la dernière montée pour nous hisser au sommet du Pico Ruivo, à 1862 mètres d'altitude, le point culminant de Madère. Autant dire que d'ici la vue est à 360° et s'étend jusqu'à l'horizon. Le vent souffle aussi, assez froid, et les nombreux touristes, plus ou moins marcheurs, français et allemands en majorité, ne restent pas là très longtemps.
Nous redescendons au refuge pour suivre le sentier PR1.2 filant jusqu'à Achada do Texeira où le taxi vient nous récupérer pour nous conduire à Santana où nous logeons à l'hôtel Colmo, à deux pas des maisons traditionnelles au toit de chaume. Maison traditionnelle à Santana
Maison traditionnelle à Santana
Malheureusement, cela n'a pas grand chose de typique puisqu'il s'agit de reconstitutions destinées à attirer le touriste.
Jeudi 15 juin 2017
Le taxi nous dépose ce matin au parking du rio das Pedras. De là, il est possible de monter vers le Pico das Pedras, mais nous prenons la direction de Queimadas en suivant une levada le long d'un large sentier. Après avoir atteint la maison forestière au toit de chaume, nous empruntons le chemin balisé PR9 en direction de Caldeirão Verde, le Chaudron Vert, en suivant toujours une levada dont nous remontons le courant. Levada et maison forestière de Queimadas
Levada et maison forestière de Queimadas
À main gauche, c'est une sorte de mur végétal composé de mousses et fougères alors que sur la droite l'abîme est souvent masqué par les arbres. Des barrières équipent les portions les plus exposées, si bien que la randonnée se fait sans aucun danger. Nous retrouvons les fleurs aperçues les jours précédents : hortensias, géraniums, orchidées...
Trois tunnels assez longs, parfois assez bas et nous obligeant à avancer courbés, jalonnent le parcours. Heureusement, nos lampes frontales nous aident à avancer dans l'obscurité le long du canal d'irrigation. Plus loin, le sentier se fait plus étroit encore. Nous progressons sur la margelle de la levada, une simple main courante nous séparant du vide sur notre droite.
La Caldeirão Verde est une sorte de cirque aux parois vertigineuses. Une cascade de presque cent mètres tombe du sommet dans un petit lac alimentant la levada. Cascade de la Caldeirão Verde
Cascade de la Caldeirão Verde
Nous faisons notre pause de midi en ce lieu. Il y a de plus en plus de monde, trop même pour vraiment apprécier l'endroit. Il faut dire qu'il s'agit là d'une des randonnées les plus courues de Madère. Nous ne tardons donc pas à repartir le long de la levada, empruntant le sentier en sens inverse. Après avoir franchi deux des tunnels, nous bifurquons sur notre gauche, plein nord, en direction de Ilha via la vallée de Lapa. Le chemin en descente est assez glissant et n'offre que peu d'intérêt, hormis quelques vues sur la côte septentrionale de l'île.
Le taxi vient nous chercher sur la place de l'église d'Ilha pour nous ramener à notre hôtel de Santana.
Vendredi 16 juin 2017
Nous débutons notre randonnée à Achada do Teixera où le taxi nous a déposé. Nous remontons le sentier jusqu'au refuge du Pico Ruivo en suivant le balisage PR1.2. Le soleil brille, le ciel est dégagé sauf au nord de l'île toujours sous les nuages. Vers l'est, nous avons une jolie vue sur la vallée de Ribeira Seca et sur le Pico do Arieiro. Nous avons ainsi un aperçu de la randonnée effectuée mercredi. Pico do Arieiro, Pico das Torres et Pico Ruivo
Pico do Arieiro, Pico das Torres et Pico Ruivo
Victor me donne le feu vert pour monter au sommet du Pico Ruivo. Je m'élance pour une ascension express, prends un peu de temps pour admirer une nouvelle fois Madère depuis son point culminant, et je redescends rejoindre le groupe à la croisée des chemins. Nous prenons la direction d'Encumeada par le sentier PR1.3. Sur le panneau indicateur, il est annoncé 11,4 kilomètres de randonnée.
Le chemin fait les montagnes russes, tantôt versant sud, tantôt versant nord, offrant de jolies vues sur les sommets acérés des Pico Arieiro et Pico do Gato. La végétation est principalement composée de genêts avec, çà et là, des orchidées. À un moment, nous traversons une forêt morte, des troncs et des branches blanchis entremêlés, vestige d'un incendie.
À Boca dos Torrinhas, le plateau de Paul da Serra et ses éoliennes s'offre à nos yeux. Vers le sud, la vallée de Curras das Freiras forme comme une cicatrice descendant jusqu'à la mer. Vue sur Curral das Freiras
Vue sur Curral das Freiras
Les nuages du nord partent à l'assaut de la crête où nous progressons pour se déverser sur le versant sud.
Nous pique-niquons dans un petit endroit sympa, entourés par de nombreuses orchidées rose-violet. Orchidées
Orchidées
La descente se fait en empruntant de nombreux escaliers, dans les nuages, jusqu'au col d'Encumeada (1007 m). Notre hôtel se trouve cent cinquante mètres plus bas, au bord de la route.
Cette randonnée est sans doute, avec la traversée entre le Pico do Arieiro et le Pico Ruivo, l'une des plus belles de l'île de Madère.
Samedi 17 juin 2017
La randonnée du jour est inversée par rapport à ce qui était prévu au programme. Après un transfert assez long en taxi, nous commençons à marcher à Boca do Corrida. Nous suivons le Caminho Real do Encumeada, ou Chemin Royal, souvent pavé, qui a longtemps été une importante voie de communication entre les montagnes et la côte sud de l'île. Le sentier s'élève d'abord graduellement avant de s'aplanir jusqu'à Boca das Relvinhas où il se sépare en une branche filant vers la vallée de Curral das Freiras et le sommet du Pico Grande. Malheureusement, nous ne ferons pas cette ascension qui doit offrir un joli point de vue, poursuivant plutôt le long du chemin royal. Lors de cette longue descente, la vallée de Serra de Agua et, au-delà, la chaîne des pics du centre de Madère s'offre à nos regards. Entre Boca do Corrida et Encumeada
Entre Boca do Corrida et Encumeada
Le chemin court à flanc le long de la paroi occidentale, verticale, du Pico Grande. En direction du col d'Encumeada, nous assistons à un étonnant spectacle : profitant de ce point bas dans la muraille de roche volcanique, les nuages y glissent du versant nord vers le versant sud où ils s'évaporent. L'impression de voir couler de l'eau est saisissante. Les nuages se déversent depuis le col d'Encumeada
Les nuages se déversent depuis le col d'Encumeada
Plus bas, un vieux pont de pierre enjambant un torrent est l'endroit idéal pour pique-niquer à l'ombre d'une forêt d'eucalyptus. Avant de parvenir au col, nous entamons une légère remontée dans la brume, ou plutôt les nuages, les mêmes que nous avions vu s'écouler d'un versant à l'autre plus tôt dans la matinée, puis nous descendons à l'hôtel par la route.
Peu satisfait par cette randonnée, peu difficile car souvent en descente, mais surtout sans grand intérêt au niveau des paysages, je repars seul avec mon sac à dos et mon appareil photo, jusqu'au col d'Encumeada. Là, je suis la levada do Norte, direction Folhadal. Je chemine au soleil, au-dessus des nuages, jusqu'à une bifurcation où le sentier s'enfonce dans un tunnel assez bas. J'ai ma lampe frontale, aussi je m'y enfonce. La traversée le long du canal dure près de cinq minutes. Je ne croise qu'un couple qui tente d'éclairer son chemin avec le flash d'un téléphone portable. Lorsque j'émerge du tunnel, je suis surpris de me retrouver noyé dans la brume. La visibilité est peut-être de cent à cent cinquante mètres. La végétation luxuriante forme par endroit des ombres étranges. Je continue à marcher le long de la levada dans cette ambiance brumeuse, fantômatique, qui n'est pas pour me déplaire. Dans l'enfer vert...
Dans l'enfer vert...
Arrivé à une arche de pierre, creusée par l'homme pour faire passer le canal, je m'oblige à faire demi-tour. À la sortie du tunnel emprunté auparavant, je prends sur la droite, direction plein sud, à nouveau au soleil. Je poursuis ainsi pendant un gros quart d'heure, profitant de jolies vues sur la vallée et le Pico Grande au-delà. Mais l'heure tourne et je fais une nouvelle fois demi-tour pour retourner à l'entrée du tunnel où j'emprunte une route forestière aboutissant juste au-dessus de l'hôtel. Mon escapade solitaire aura duré deux heures.
Dimanche 18 juin 2017
Victor décide de modifier la randonnée prévue au programme. Nous partons de Lombo do Mouro, sur la route au-dessus du col d'Encumeada, pour suivre le sentier PR17. Nous montons au soleil, au-dessus des nuages, avant de suivre une levada. Vers l'est, la vue est dégagée sur les pics où nous avons randonné les jours précédents. Le sentier se glisse le long d'une paroi verticale de basalte noir au pied du plateau Paul da Serra. De petites cascades en tombent, petite douche assurée ! Cascade au-dessus du sentier
Cascade au-dessus du sentier
De nombreuses fleurs jalonnent le parcours : orchidées, géraniums, pissenlits arborescents...
Plus loin, nous faisons un petit détour vers un belvédère pour profiter de la vue sur les éoliennes du plateau nous surplombant et sur São Vicente et sa vallée, au nord. Nous descendons jusqu'à une route de service, une piste en fait, avant d'emprunter un sentier courant au milieu des bruyères arborescentes. Laissant de côté une tourbière asséchée, nous faisons une pause au bord d'une levada abandonnée. Ses pierres couvertes de mousse accusent le poids des années, mais de l'eau y coule toujours.
Une longue volée d'escaliers permet de perdre rapidement pas loin de deux cent cinquante mètres de dénivelé. Les nuages montés pendant notre pause sont là. Nous sommes plongés dans la brume. De nouveaux escaliers nous font remonter d'une soixantaine de mètres jusqu'à une levada assez large et profonde que nous suivons. Du coin de l'œil, je surprends un mouvement dans les eaux claires : deux petites truites. Cascade dans la brume de Madère
Cascade dans la brume de Madère
Nous traversons une série de petits tunnels, contemplons quelques cascades semblant surgies de la brume, et empruntons un long tunnel. Parcourir ses huit cents mètres de long prend un certain temps et c'est là que l'on voit qu'il est important de disposer d'une bonne lampe frontale quand on randonne à Madère. Le sentier le long de la levada est assez étroit et oblige par moment à bien baisser la tête car le plafond est assez bas. Nous en émergeons à quelques dizaines de mètres de l'endroit où je m'étais arrêté hier lors de ma balade en solitaire. Nous empruntons le dernier tunnel, qui fait tout de même quatre cents mètres, pour émerger à la bifurcation. Le sentier PR17 file à gauche le long de la levada jusqu'au col d'Encumeada, mais nous descendons par la piste forestière jusqu'à l'hôtel, satisfait de cette très jolie journée.
Le taxi vient nous chercher quelques instants plus tard pour nous conduire à Jardim do Mar, à l'hôtel du même nom, où nous passerons deux nuits sur la côte occidentale de l'île.

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